Spiritualité - Sédir, Yvon Le Loup (lu également Paul Le Loup...) Quelques textes de Sédir, pour qui sa rencontre avec Monsieur Philippe fut un des moments les plus marquants de son existence. Il était déjà écrivain, mais plus spécifiquement sur l'occultisme. Il devient dès lors un des écrivains les plus empreints de mysticisme qui se puisse concevoir. Par de nombreux écrits, il tentera de partager, de transmettre l'extraordinaire de ce que fut pour lui cette Rencontre.
L'un des ouvrages : Initiations relate sa rencontre avec Philippe, de Lyon...
LE LOUVRE
Andréas, ce matin-là, m'avait emmené au Louvre voir, avant
l'ouverture, la collection Camondo.
Il s'y trouvait une statue bouddhique remarquable par un très rare
détail de geste.
En la cherchant, nous passâmes devant une fenêtre ouverte. Un buste siamois, de
vieux bronze bleu vert, s'y haussait sur un socle; derrière lui le ciel
printanier de Paris étendait ses soies changeantes entre les perspectives
classiques du Carrousel et les arbres élégants des Tuileries.
Et, tout là-bas, au haut d'une montée mauve et grise, robuste, l'Arc de Triomphe
détachait sa silhouette de jade sur les nacres roses de l'occident.
Paysage délicieux, sourire de Paris, grâce française, ordonnée avec de charmants
imprévus, toute en nuances, en souffles, avec ces nettetés de dessin qui
arrêtent la rêverie et l'obligent à devenir une pensée.
- Regarde, me disait Andréas, regarde l'âme de la France.
- Oui, je regarde de tous mes yeux...
- Et tu ne regardes pas encore assez. Ah ! mon docteur j'ai connu bien des pays,
mais la France! On ne sait pas tout ce que le Ciel a donné à la France.
- Mais, dis-je, la question se pose. Comment se fait-il alors que c'est la
France qui semble conduire l'Europe à tous les désordres, à des violences, à des
scandales ?
- C'est, d'abord, docteur, que, par une grâce de Dieu quand la France fait le
mal, elle le fait plus au grand jour que n'importe quelle autre nation. C'est un
grand privilège que de pouvoir faire cela. Et puis, tu te souviens bien de ton
alchimie : il faut porter les forces à l'extrême gauche pour qu'elles reviennent
à l'extrême droite. La France, dans cet athanor de la race blanche, est le sang
du lion.
- Serait-ce donc la raison pour laquelle, à notre époque, et surtout dans notre
pays, toutes les tendances, politiques, philosophiques, religieuses, sociales,
s'irritent et se raidissent ? Serait-ce un exemple de ce monde de la colère dont
parle Boehme, qui écume et qui bouillonne de fureur jusqu'au craquement, jusqu'à
l'éclair du Feu ?
- Prends ces images, si elles te conviennent , elles sont assez fidèles. Regarde
autour de toi, regarde ton propre domaine, la médecine. Les efforts les plus
hardis ne te semblent-ils pas aboutir à une violation des lois de la Nature ?
- Vous ne voulez pas dire que les travaux de Carrel - car c'est bien là l'effort
le plus hardi, n'est-ce pas ? - sont antivitaux ? J'y vois les rêves des
alchimistes presque dépassés; j'y entrevois un avenir de splendeur presque
effrayant, c'est...
- Moi, mon docteur, je te vois dans une de tes crises d'ésotérisme, interrompit
Andréas en souriant. La vérité selon la Nature et la vérité selon Dieu, c'est
deux vérités. Tu le sais bien, l'alchimie vue selon la Nature aboutit à des
résultats scientifiquement vrais; vue selon la Sur-Nature, elle est fausse.
- Oui, mais Carrel, ce n'est pas de l'alchimie.
- Mais si, mon docteur. Les alchimistes forcent le minéral à vivre comme un
végétal; aujourd'hui on force le tissu animal à vivre comme le végétal. C'est un
viol spirituel. Et toutes les complications futures de ces cellules dépaysées !
Que de souffrances pour les malades et pour les animaux! Que de cris, de l'autre
côté, quand ils mourront !
- Ah! m'écriai-je tout bas, c'est encore : Ne mettez pas de pièce neuve à un
vieux vêtement; n'est-ce pas, mon Maître ?
- Mais oui ; et cependant tout est si simple. Si les hommes voulaient bien, le
Ciel leur enverrait constamment des miracles. Le Père est si bon, si tu savais !
Et le vieil Andréas hochait la tête, en voûtant ses larges épaules. Et l'air
subtil de l'Esprit pacificateur passait sur nous, dans ces salles aux murs
desquelles resplendissaient les extrêmes efforts de l'extrême culture humaine.
Quelle différence entre ces deux atmosphères!